Raphaël Adam est à la fois un chef discret et passionné. A Temploux (Belgique), en novembre 2009, il décroche une étoile au Guide Michelin pour le restaurant L’essentiel dont il est aujourd’hui encore propriétaire avec son épouse Bénédicte. Avec humilité, il dit que le succès et l’évolution de sa cuisine sont avant tout le résultat du travail de toute son équipe. Le plaisir autour de bons produits travaillés avec respect et une ambiance familiale font de cette adresse namuroise l’une des plus courrues.
Originaire de Tongrinne, Raphaël Adam a suivi une formation en hôtellerie au CENAM (aujourd’hui l’IFAPME Namur). A la sortie de l’école, ses parents lui trouvent une place chez Claude Garin au Prince de Liège à Gembloux. « J’y ai travaillé pendant quasi 2 ans en salle avec un très bref passage en cuisine. A l’époque, un restaurant venait de voir le jour : L’essentiel à Temploux. A peine six mois après l’ouverture, le propriétaire, monsieur Benoît Gersdof, m’a engagé. J’ai occupé tous les postes ! » A partir de 1995, Raphaël gravit les échelons et à 23 ans, ce Chef se fait remarquer en remportant la deuxième place au Championnat Mondial de la Chaîne des Rôtisseurs et le titre de Meilleur Jeune Rôtisseur Belge 2001. « Monsieur Gersdoff trouvait sans doute quelque chose de bien en moi puisqu’il m’a gardé toutes ces années. Et comme il connaissait pas mal e monde dans le milieu de la gastronomie, il m’a envoyé quelques mois chez Yves Mattagne au Sea Grill* et ensuite aux Elysées du Vernet** à Paris pendant un an. » Quand il revient, Benoît Gersdoff ouvre un deuxième restaurant : La Plage d’Amée. « Il m’a directement confié les commandes du restaurant. » se souvient Raphaël Adam. « Pendant deux ans et demi, j’ai géré l’établissement avec d’abord une équipe de 3 puis 6 personnes en cuisine comme en salle. »
Mais en 2007, un événement inattendu va tracer le chemin de Raphaël et son épouse Bénédicte. « Monsieur Gersdoff décide d’arrêter l’Essentiel. Il nous propose de reprendre le restaurant où j’avais fait mes premières armes en tant que Chef. » Deux ans et demi plus tard, L’essentiel est récompensé par une étoile dans l’édition 2010 du célèbre Guide Michelin. « C’est une consécration. On en est surtout fier pour l’équipe. Encore aujourd’hui, c’est une belle reconnaissance. Personnellement, j’ai toujours travaillé pour que les clients soient avant tout heureux et qu’il y ait une bonne ambiance, dans un esprit familial. Le travail s’en ressent et c’est beaucoup mieux. »
Quand le Chef parle de sa cuisine, il reste très modeste : « C’est simplement le mariage de bons produits avec une préparation travaillée. Les chefs croisés m’ont inspiré dans le sens où ils travaillaient toujours d’excellents produits frais. Il n’y a pas que de la langoustine qui permet de créer de belles assiettes. Nous venons de mettre au point un menu uniquement pour les végétariens avec rien que des légumes en plus d’un menu 6 services qui peut être décliné en 4 sans oublier la carte bien sûr. » L’un des produits qu’il préfère préparer est le pigeonneau mais ce qui le passionne par-dessus-tout c’est le pain ! « Tous les matins, je façonne les pains pour le restaurant. Lors de mon passage à Paris, j’ai découvert la pâtisserie et j’ai beaucoup aimé ça. »
Si Raphaël admet que sa cuisine a évolué avec le temps, il pense que c’est surtout le fruit du travail de toute son équipe. « Je délègue beaucoup de choses y compris les achats des produits. Mon second, Cédric, est là depuis 12 ans. Tous les mois, nous nous réunissons et réfléchissons tous ensemble au menu. C’est un travail d’équipe avant tout et je pense que c’est grâce à cela que la cuisine de L’essentiel a évolué. Tout est dégusté par le personnel en cuisine et une partie de la salle. Mon épouse Bénédicte goûte toujours tout, ce qui facilite son travail pour les accords mets-vins. Ce que je cherche avant tout, c’est que le client sorte en ayant passé un très beau moment. L’essentiel, c’est le plaisir ! Il faut être bien accueilli et avoir envie de revenir. Avec l’équipe que j’ai, les gens finissent toujours par repartir avec le sourire. »
Raphaël Adam utilise les œufs de la ferme de Frocourt dans sa cuisine, de nombreux fromages belges (notamment de la ferme Counasse à Stoumont) qu’il achète sur le marché matinal namurois ou encore la viande du fournisseur Le poulet noir à Petit-Han. Mais il regrette de ne pas pouvoir le faire avec plus de producteurs locaux. « Pour un restaurant de notre taille, l’approvisionnement est parfois difficile. Ne plus savoir contenter la clientèle tout à coup parce que le producteur n’a plus le produit, ce n’est pas envisageable. »
Avec la crise sanitaire, l’Horeca s’est retrouvé d’abord à l’arrêt puis une réouverture progressive en mai, avec les terrasses. Les restaurateurs ont dû s’adapter sans cesse et Raphaël a été, plus que jamais, attentif aux coûts et notamment au gaspillage alimentaire. « Nous avons été obligé d’augmenter très légèrement les prix mais notre souhait est toujours de rester accessible au plus grand nombre. Et pour que tout le monde s’y retrouve, il faut éviter de gaspiller. »
En plus d’une cuisine gastronomique étoilée avec des produits de qualité sublimés par le Chef et son équipe, les chariots de pains et de fromages demeurent incontournables à L’essentiel. « Certains habitués choisissent le petit menu ou même juste un plat avec le supplément fromages. Quand je suis revenu de France, j’ai proposé au propriétaire de l’époque de créer un chariot de pains, ce qui n’existait nulle part ailleurs. Nous proposions dix sortes de pains et nous n’avons jamais pu arrêter ! (rire) Pour les fromages, nous avons d’abord commencé avec une simple planche. Aujourd’hui notre chariot en compte 50-60 dont une bonne vingtaine de belges Même si j’adore travailler la pâtisserie, quand je vais au restaurant, je termine personnellement mon repas avec des fromages. »
La carte des vins est impressionnante laissant aussi bien la place aux références françaises mais également du monde. En accord avec les menus deux options : celle de la découverte ou celle, plus classique, tournée vers les vins français. C’est Bénédicte, l’épouse de Raphaël qui officie en salle. Elle a également largement contribué à la nouvelle décoration du restaurant. « Cela mûrissait depuis longtemps dans l’esprit de mon épouse » affirme Raphaël. « Du coup, pendant le confinement, nous avons fait appel à notre architecte d’intérieur de St Trond qui nous a proposé un très beau projet. Bénédicte a suivi le chantier de près en donnant son avis. Pendant les rénovations intérieures, le jardin puis les terrasses ont été refaites également.»
Après quelques de mois de travaux, le résultat est magnifique ! Dans le respect du bâtiment, une tannerie du X11e siècle, la lumière a été amenée par des ouvertures. Le décor est sobre, épuré. Le gastronome, qu’il soit habitué ou de passage, se sent immédiatement à l’aise grâce à un accueil attentif. Raphaël et Bénédicte offrent aussi la possibilité aux clients plus éloignés de Temploux de séjourner dans l’une des 4 chambres hôtes installées dans une fermette rénovée.
Texte: Muriel Lombaerts